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Main-d’œuvre en crise : quand la traque aux migrants menace l’agriculture américaine

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Main-d’œuvre en crise : quand la traque aux migrants menace l’agriculture américaine

Dans les champs de Californie ou du Texas, les tracteurs avancent au rythme des récoltes, mais le bruit mécanique ne masque pas une inquiétude grandissante. Les expulsions de migrants sans papiers orchestrées par l’administration américaine mettent en péril un secteur agricole déjà fragilisé. Derrière les discours sur la sécurité et la souveraineté nationale, c’est la stabilité alimentaire et les prix pour les consommateurs qui sont menacés. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 40 % des travailleurs agricoles entre 2020 et 2022 étaient des migrants sans statut légal, et près de 150 000 expulsions ont été enregistrées depuis janvier. Le vide laissé par ces départs forcés ne pourra pas être comblé par les travailleurs américains, même motivés par des salaires plus élevés.

La politique actuelle, combinée à des restrictions sur les visas saisonniers H-2A, oblige les migrants encore présents à supporter seuls le coût de leur logement et à accepter des salaires réduits. Les mesures, censées pallier la pénurie, ne suffisent pas. Le département du Travail alerte : la production domestique pourrait ralentir, et les prix alimentaires grimper. Le paradoxe est cruel : Donald Trump promet de soutenir les agriculteurs financièrement, mais ses décisions renforcent le déficit de main-d’œuvre et risquent d’éroder son socle électoral dans des zones rurales où il reste populaire.

Remplacer les travailleurs migrants par des citoyens américains, comme le suggère la secrétaire à l’Agriculture, s’avère irréaliste. La majorité de ces adultes sont déjà occupés par un emploi à temps plein ou partiel, et peu sont disposés à effectuer des travaux saisonniers exigeants dans des conditions souvent difficiles. Le recours à la main-d’œuvre locale soulève aussi des questions politiques et éthiques qui compliquent davantage la mise en œuvre de cette solution.

Cette situation se superpose à d’autres tensions : les droits de douane sur les exportations américaines, les ripostes commerciales de la Chine et la hausse des coûts logistiques contribuent à fragiliser un secteur déjà sous pression. Les agriculteurs, confrontés à une pénurie de main-d’œuvre et à l’instabilité des marchés, doivent jongler entre production, rentabilité et politique nationale. Le risque est tangible : des récoltes moins abondantes, des prix plus élevés, et une population entière potentiellement touchée par ces décisions.

Si les élections de mi-mandat approchent, le calendrier politique ajoute une pression supplémentaire. Les décisions sur l’immigration, présentées comme des mesures de fermeté, pourraient se retourner contre ceux qui les ont promues, transformant des promesses de protection en source de vulnérabilité pour une partie significative de la population américaine. Dans les champs, la récolte des tomates ou du maïs ne se résume plus à un enjeu agricole : elle est devenue un révélateur des tensions économiques et sociales d’une Amérique en mutation.

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