C’est une décision lourde de conséquences pour l’avocate avignonnaise Nadia El Bouroumi, figure controversée du procès retentissant des viols de Mazan. Ce mercredi 23 avril, le Conseil régional de discipline des avocats, relevant de la cour d’appel de Nîmes, a statué : Me El Bouroumi se voit interdire d’exercer sa profession pendant un an avec sursis. Une sanction assortie de 20 heures obligatoires de formation en déontologie.
Des publications incompatibles avec l’éthique professionnelle
À l’origine de cette sanction, plusieurs entorses aux règles déontologiques commises entre 2021 et 2023, période précédant le procès ultra-médiatisé dans lequel elle représentait deux accusés. L’avocate est notamment accusée d’avoir diffusé sur les réseaux sociaux des contenus issus d’audiences judiciaires, une pratique rigoureusement encadrée par la profession.
Bien qu’elle ait été relaxée pour la diffusion d’images d’audience sur les réseaux sociaux, son comportement général, jugé irrespectueux des principes fondamentaux de la profession, a pesé dans la balance. Le Conseil de discipline n’a pas retenu l’accusation la plus grave, mais les pratiques répétées de communication publique pendant un procès en cours ont soulevé de vives critiques.
Une mise en scène du procès sur Instagram
Le nom de Me Nadia El Bouroumi est apparu dans les colonnes de nombreux médias fin 2024, en pleine tenue du procès dit « des viols de Mazan », une affaire d’une violence inouïe. Dominique Pelicot, principal accusé, y était jugé avec cinquante autres hommes pour avoir drogué son épouse, Gisèle Pelicot, et organisé des viols collectifs à leur domicile de Mazan, dans le Vaucluse.
Durant les débats, Me El Bouroumi a multiplié les publications sur Instagram, racontant quotidiennement les audiences avec un ton jugé trop léger, presque désinvolte. De nombreux internautes se sont indignés du contraste entre la gravité des faits jugés et l’approche très personnelle – voire théâtralisée – de l’avocate.
Une décision qui fait débat dans la profession
Si certains avocats défendent le droit à la liberté d’expression de leur consœur, d’autres dénoncent une atteinte grave à la dignité de la profession. « Une avocate n’est pas une influenceuse », lâche un confrère du barreau de Marseille, sous couvert d’anonymat. « Le procès n’est pas une scène, c’est un espace solennel où la retenue et le respect des victimes priment sur toute mise en scène personnelle. »
Me Olivier Morice, avocat de Me El Bouroumi, a annoncé que sa cliente ferait appel de cette décision disciplinaire. Il estime que la sanction est disproportionnée et qu’elle répond davantage à une pression médiatique qu’à une réelle évaluation des faits.
Des conséquences à long terme
Outre la suspension avec sursis, la décision interdit à Me El Bouroumi d’intégrer l’ordre des avocats ainsi que le Conseil national du barreau, deux institutions essentielles à la vie professionnelle d’un avocat. Ces restrictions pourraient freiner durablement son avenir dans la profession, déjà entaché par cette affaire.
Dans un contexte où les réseaux sociaux occupent une place croissante dans la communication judiciaire, cette décision fait figure de rappel sévère : l’éthique et la discrétion restent les piliers fondamentaux de la justice, au-delà de toute quête de visibilité numérique. Le barreau semble ainsi vouloir tracer une ligne claire entre engagement et mise en scène.
Le débat reste ouvert, mais la sentence, elle, est tombée.